Absentéisme pour l’Aïd-El- Fitr, “évaluation” ou “fichage” ?, une affaire qui fait rage au sein des communautés éducatives, associatives et musulmanes.
L’affaire a suscité un tollé d’indignation.Le gouvernement se défend et le ministère de l’Éducation explique « ne pas être du tout à l’origine de cette requête ».
Par Nawel Thabet / Medianawplus
Dans un communiqué adressé à la presse dimanche 21 mai 2023, la secrétaire d’État chargée de la Citoyenneté, Sonia Backès, a reconnu avoir demandé à des dizaines d’établissements scolaires situés à Montpellier et à Toulouse une « évaluation du taux d’absentéisme constaté à l’occasion de l’Aïd el-Fitr
“Le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer étudie régulièrement l’impact de certaines fêtes religieuses sur le fonctionnement des services publics, et notamment au sein de la sphère scolaire. C’est dans ce cadre qu’une évaluation du taux d’absentéisme constaté à l’occasion de la fête de l’Aid-el-Fitr, le 21 avril dernier, a pu être demandée, dans certaines académies, aux chefs d’établissement”.
Mais il a nié tout fichage, ” le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer ne pratique bien évidemment aucun fichage des élèves en fonction de leur confession : aucune donnée nominative n’a été ni demandée ni recensée à aucun moment”, a conclu la secrétaire d’État chargée de la Citoyenneté, Sonia Backès.
Cette justification n’a pas réussi à faire tomber la colère des opposants ainsi que les représentants des musulmans en France.
Pour Nathalie Oziol, députée LFI de L’Hérault, “c’est absurde et dangereux.L’absentéisme est un problème à l’école.Il n’a rien à voir avec la religion”.
L’islamophobie en France vient de franchir un nouveau cap
De son côté Abdallah Zekri, président de l’Observatoire national contre l’Islamophobie n’a pas caché sa colère “L’islamophobie en France vient de franchir un nouveau cap et fait craindre le pire car on se rend compte que des éléments d’un corps constitué agissent en électrons libres, sans doute mus par une idéologie».
” Scandaleux et à vomir.”, s’est indigné Kamel Meziti, docteur auteur du dictionnaire contre l’islamophobie.” mais où va la France , où va l’État de droit et la laïcité quand on fait le fichage des élèves musulmans ? Demain à qui le tour avec cette chasse aux sorcières nauséabonde?Cela devient irrespirable!”, s’est interrogé Kamel Meziti.
Face à cette polémique, certaines familles sont inquiètes et redoute une forme de fichage. Et cette affaire sème le trouble entre les établissements et les familles.
Le comptage des absents le jour de l’Aïd el-Fitr aux établissements toulousains a été fait par de policiers suite à une directive du ministère. À Montpellier,un courrier a été envoyé par le service départemental de l’Éducation nationale, qui relayait une demande du ministère de l’Intérieur.
Les chefs d’établissement stupéfaits
« Ça n’est jamais arrivé auparavant »,a expliqué Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale (SNPDEN), dans une déclaration à la presse.
De son côté, SOS racisme a pointé une stigmatisation des élèves musulmans : « Pour quelles autres fêtes religieuses le ministère de l’Intérieur a-t-il demandé une évaluation du taux d’absentéisme aux chefs d’établissement ? », interroge ironiquement l’association dans un communiqué.
La communauté éducative s’interroge aussi des intentions qui se cachent derrière cette enquête du ministère de l’Intérieur . « Nous souhaitons savoir à quelles fins étaient destinées ces statistiques », a exigé la FSU dans un communiqué publié ce lundi 22 mai.
Le président de la Ligue des droits de l’Homme de Haute-Garonne s’insurge également : « Ces personnes ont tout faux en terme de respect des droits fondamentaux. Faut-il rappeler aux fonctionnaires que la liberté de conscience et la liberté de culte sont garanties par l’Etat ? ». La communauté musulmane est de nouveau ciblée, regrette-t-il.
« Ce n’est pas quelque chose que l’on demande aux personnes de confession chrétienne ou juive par exemple», soulignant que ces requêtes peuvent tomber sous le coup de la loi. « Il s’agit d’un ciblage discriminant. S’il s’avère qu’il y a bien objet à poursuivre, il n’est pas du tout exclu qu’on ne le fera pas ».