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Rémi Camus : ce berrichon va relier la Corse à Monaco à la nage

Après 5.400 km en courant à travers l’Australie, 4.400 km en hydrospeed sur le Mékong et le tour des côtes françaises à la nage, Rémi Camus se prépare à une nouvelle aventure : la traversée de Calvi (Corse) à Monaco à la nage dont le départ est prévu vers le 7-8 juin. L’occasion pour l’aventurier-explorateur berrichon de 38 ans, qui a grandi près de St-Florent-sur-Cher, de sensibiliser les populations et le public sur la préservation de l’eau, l’accès à l’eau potable et la protection des océans. Entretien.

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Rémi Camus s’entraîne en nageant dans la Saône pour se confronter à la nature et à l’absence de visibilité. Photo Rémi Camus.

Propos recueillis par Estelle Boutheloup/ Medianawplus

Medianawplus. Dans une semaine, vous entamerez la traversée de la Méditerranée à la nage entre Calvi, en Corse, et Monaco, quel est son objectif ?

Rémi Camus. Il est environnemental et scientifique. Avec le CHU de Grenoble un protocole a été mis en place pour comprendre le stress sur le corps en environnement hostile et longtemps exposé en milieu marin. Des prélèvements salivaires seront ainsi faits trois fois par jour pendant la traversée en plus deux prélèvements sanguins au départ et à l’arrivée. Des contrôles sur la qualité de l’air et de l’eau seront aussi effectués. Le voilier qui m’assistera tirera des boudins qui permettront à Capillum, société spécialisée dans la collecte et le recyclage des cheveux, de prélever des hydrocarbures perfluorés et des huiles de surface qui seront ensuite analysés. 

Medianawplus. Quel sera votre quotidien durant cette dizaine de jours ?

Rémi Camus. Je dois partir autour du 7-8 juin selon la météo, pour 180 km de nage en autonomie et sans assistance. Je nagerai en tractant une plateforme chargée de 200 kg de nourriture, canes à pêche, désalinisateur, matériel pour filmer et raconter ce que je vis et ce que je vois, et tout ce qu’il faut pour dormir. La traversée durera entre 7 et 15 jours en fonction des courants et de la météo. Seul un voilier m’assistera pour la sécurité : il sera là uniquement pour prévenir les bateaux de ma présence. À son bord, il y aura un vidéaste et un créateur de contenus pour les réseaux sociaux et un film qui sortira fin 2023-début 2024. Mes journées seront très portionnées. Sans repère visuel en mer, le seul que j’aurai c’est le temps : lever 5h, nage de 8h à midi et de 14h à 18h. Coucher à 21h.

Medianawplus. Dans quel état psychologique êtes-vous, vous appréhendez ?

Rémi Camus. La seule appréhension, ce sont les conditions de mer : s’il y a un gros temps, je risque le mal de mer, donc des vomissements et une perte d’appétit. Je me prépare depuis septembre 2020. Je mange six repas par jour pour prendre du bon gras à brûler, je fais des exercices en salle pour prendre de la masse et je nage beaucoup en rivière, dans la Saône, pour me préparer mentalement à nager en pleine nature et me confronter à la non visibilité.

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Pour la traversée Calvi-Monaco, Rémi Camus tractera une plateforme chargée de 200 kg de matériels. Elle sera aussi l’occasion d’étudier les effets du stress sur le corps humain et d’analyser la qualité de l’eau. Infographie Rémi Camus.

Medianawplus. Une nouvelle aventure qui s’ajoute à d’autres expéditions et non les moindres…

Rémi Camus. L’Australie en 2011 : 5.400 km en courant avec une remorque pour aller à la rencontre des aborigènes Kaltukatjara et Mutitjulu. Objectif : collecter de l’argent pour l’association Lowe. J’ai fait des rencontres atypiques car ce sont des peuples qui ont la méfiance du blanc et je découvre des gens drogués, alcoolisés, obèses… pas forcément un joli tableau. Mais j’ai eu le privilège de moments d’échanges et de pouvoir admirer la voie lactée au-dessus de moi. 2013, 6 mois de nage en hydrospeed sur 4.400 km du Mékong entre rapides, forts torrents et siphons accidentés. Je suis allé à la rencontre des populations locales et de leur mode de vie autour de l’eau. Plus de 70 millions de personnes vivent autour du Mékong ! Il y a beaucoup d’eau mais impropre et chargée en déchets. Une pollution très impressionnante d’excréments, sacs poubelle, produits phyto, seringues, animaux morts… qui se termine en Mer de Chine. Une décharge à ciel ouvert sans infrastructure pour collecter. Au fin fond de la campagne on enfouit ou on brûle les déchets, et on jette les cendres dans le fleuve. Et enfin 2018, un Tour de France à la nage pour voir et comprendre la pollution sur nos côtes. J’ai rencontré 23.000 personnes (scolaires, plaisanciers, estivants, habitants…) : certains sont au courant, d’autres pas du tout.

Medianawplus. Avez-vous vécu des situations périlleuses ? 

Rémi Camus. En Australie j’ai eu des moments de stress oui : j’ai dû boire ma pisse pendant quatre jours par manque d’eau au cœur du désert et je me suis fait piquer par une des araignées les plus dangereuses, une red back. Sur le Mékong, j’ai failli être aspiré par les bouches de dérivation d’un barrage hydraulique : je me suis arrêté à 200-300 m de ces bouches et à 30 m d’une chute d’eau… Pour gérer le stress il faut beaucoup d’anticipation, d’observation et d’analyse des situations. Mais il est nécessaire pour avancer et stimuler. Car le combat est de taille ! Depuis 13 ans, je vois une évolution qui ne va pas dans le bon sens avec des dégradations, des conditions de vie et des pollutions en augmentation. Et face à cela, une hypocrisie des grosses sociétés qui pratiquent du greenwashing : on parle de « croissance verte », deux mots antinomiques…

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