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Effets de la sécheresse sur les routes : le Loiret teste une solution unique au monde

Pour traiter les retraits-gonflements des sols argileux (RGA), le Département du Loiret expérimente avec le Cerema une solution inédite de bio-cimentation pour « recoller » les fissures causées par la sècheresse sur les chaussées. 

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Coupe schématique explicative du phénomène du retrait gonflement des sols argileux (RGA). Photo Cerema

Il n’y a pas que les bâtiments qui sont touchés par les retraits-gonflements des sols argileux (RGA), les routes aussi. Si ce phénomène naturel – gonflement d’un sol argileux avec l’eau et rétractation avec la sècheresse entraînant des mouvements de terrain et des fissures – s’accentue sur toute la France depuis 2015, le Loiret n’est pas épargné. « C’est même l’un des départements les plus touchés avec 70% du territoire concerné, routes comme habitations. », souligne Frédéric Legay, responsable Service et gestion des routes au Département du Loiret. « Un phénomène récurrent et qui s’amplifie avec des épisodes de sècheresses de plus en plus intenses. » Résultat : des sinistres plus importants qui se traduisent par des fissures de quelques centimètres à la profondeur d’une main, accompagnées d’un affaissement de 4 à 5 cm le long des bords de chaussée. Potentiellement dangereux pour les deux roues et les véhicules, ces désordres poussent donc à développer des solutions de stabilisation.

Des injections à 2 m de profondeurs

Entre le 17 et le 28 juillet dernier, une portion de la RD151 à Saint-Loup-des-Vignes, au sud de Beaune-la-Rolande dans le Loiret, a été retenue pour une expérimentation inédite fondée sur la biocimentation. « Un bio coulis associant calcium et carbonate », explique Lamine Ighil Ameur, chercheur au Cerema (Centre d’étude et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement). Ce chantier de 230 00 € est intervenu sur 230 m linéaire autour de deux planches d’essai pour optimiser le test. Concrètement, des trous sont forés à 2 m de profondeur. Certains d’un seul côté, d’autres de part et d’autre de la chaussée, certains en quinconce, d’autres alignés. Dans un tube, des injections de calcium et de carbonate sont alors réalisées. « Le biociment est sensé lié les éléments grâce à un liquide qui réagit et qui crée comme une colle et maintient les grains du sol et les plaquettes en cohésion pour obtenir un sol plus stable. » S’ajoutent des capteurs placés au cœur de ces planches et une station météo pour suivre et évaluer le dispositif. « C’est une première ! Jamais cette technique brevetée par une société suisse n’a encore été testée sur la problématique des sols argileux », poursuit le chercheur, également pilote et coordinateur du projet.

Réfléchir au cycle de vie de la route

Initiés dans le cadre d’un partenariat noué en 2018 entre le Conseil départemental du Loiret et le Cerema au sein de l’Observatoire des Routes Sinistrées par la Sécheresse (ORSS), ces dispositifs visent à expérimenter et tester de nouvelles solutions sans impact sur l’homme et la nature. « Le coût des travaux, de l’instrumentation et de la réfection est financé par les départements partenaires. En région Centre-Val deLoire, déjà 1,6 millions d’euros a été pris en charge par cinq départements, hors Eure-et-Loir. » En région, ce sont ainsi 8 sites sur des routes départementales, 9 procédés différents et 15 planches d’essai qui ont ainsi été mis en place. Les effets des tests étant vérifiés tous les 5 ans.

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Procédé d’injection sur le chantier test de 2021 dans le Loiret à Ingrannes. Photo CD45

« Le Département se positionne comme initiateur et aime ouvrir la voie à des solutions pérennes », précise Frédéric Legay. Et avec 3614 km de voiries à entretenir, la collectivité n’hésite pas à investir dans de nouvelles techniques économiques pour « éviter de faire, refaire et refaire encore des travaux et réduire les coûts. Derrière l’innovation il y a l’économie de demain. » Ainsi déjà deux expérimentations ont été faites dans le Loiret en 2018 sur RD17 entre Ménestreau-en-Villette et Sennely et en 2021 sur RD921 à Ingrannes (une 1ère européenne à l’époque sur la base d’une solution cationique utilisée aux USA). « Notre première mission c’est la sécurité. Aussi il faut être attentif, observer l’usage qui est fait de la route, et réfléchir à son cycle de vie. Une chaussée, ça vit ! Il faut accepter la nature et composer avec elle. »

Le 14 novembre prochain, le Cerema organise une journée technique nationale de découverte et de mobilisation à Champ-sur-Marne (Seine-et-Marne). « L’idée est de tester, d’autres solutions dans d’autres régions, d’en vérifier la reproductibilité, et de capitaliser ces expériences à travers la création d’une base de connaissances et d’un guide où sont détaillés les différents panels par solution et de les mettre à disposition des gestionnaires pour qu’ils adaptent le dispositif adéquate en fonction de la route », informe le chercheur Lamine Ighil Ameur. 

Photo de Une – Injection sur une portion de la RD151 à Saint-Loup-des-Vignes, au sud de Beaune-la-Rolande dans le Loiret. Photo CD45.

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